Dans la soie des mots

Dans la soie des mots,
les lignes jouent
sur le pas d’un fil
tissé du vent
d’envols naissants.

Les criques vagues
impriment un poème
sur le sable des silences.

Rien n’arrête la plume fugueuse
quand elle veut migrer
dans l’espace bleu
des  infinis.

La liberté est un cadeau,
enlacement d’embruns
aux couleurs de voiles.

Le poète écoute
le murmure d’une muse
cachée dans les jupes
d’étoiles lointaines.

Cœur de poésie,
âme et flux,
le monde inverse
quelques secondes
la roue des hommes
et son chemin de pierre.

Les rêves surgissent
dans l’aube douce
de simples lettres,
sacs de billes
sur le bord d’un oubli.

La soie des mots
caresse la joue
du poète inspiré
tandis que glisse
lentement
le chant de la nuit.


Sandra Dulier, Plume funambule
Ses livres – Commandes et dédicaces

Clarté des songes

Comme un berceau
sur le fil du ciel,
la lune sourit
au passager du soir.

Quelle tunique
vêt les rêves
quand le regard
est ainsi perdu ?

Dans l’ornière bleue
d’une comète vive,
un arbre-nuages
a enclos mon imaginaire.

Le jardin des étoiles
est un pré d’âmes
et l’univers murmure
un doux bonsoir.


Sandra Dulier, Plume Funambule

 

Voyages

Sur le pré de nos possibles,
les rêves ont en horizon
leurs simples écrits ;
soleil se lisant en lever d’un jour
sur la face cachée de nos espérances.
L’aube du monde naît alors deux fois,
remerciant leurs rêves
pour le courage de leurs voyages.


Sandra Dulier, Plume Funambule

 

Connexions nocturnes

Une fenêtre sur l’horizon claque le sinistre volet d’une ombre lampée de vide. La mer se déchaîne, claque les rochers, embrume la plage d’une île sur roc. Demeure de fin XIXème accrochée en proue, tu soupires un passé inconnu.

Le rêve matérialise une histoire qu’aucun livre n’avait encore narrée. Le sixième sens est une porte qui ouvre les voies de la nuit. L’oreiller tourmenté s’empreinte des mouvements saccadés d’une vision où le feu des bals s’enlise dans la fumée en chandelles.

La rêveuse connaît cet endroit primitif de son âme. Elle ignore le nom, l’adresse, le pays, les paysages. Quoique ! L’image se précise, l’atmosphère, les bruits, les sensations… Tout est étrangement connu. Des voix se perdent, se cherchent, dialoguent, sans visages, mais bien là sur cette île de nulle part.

Quelles difficultés labyrinthiques prend notre esprit lorsqu’il recherche ces instants en vertige d’un vécu que nul à part lui ne peut retrouver ! Faut-il une nuit sans lune, un corps brisé par la fièvre pour se guider à travers ses murs ? Le sommeil semble si long et cyclonique dans ces moments d’errances aux racines d’un temps insoupçonné.

Je rêve, se dit-elle… Je vais me réveiller !

Nulle volonté cependant ne peut briser le sceau d’un pacte avec ce passé. Aïeule, secret de famille, réincarnation, empreinte de vie, fantôme, folie… Pourquoi cette étrange sensation ? Une seule solution : creuser de la plume cette vision pour en désensabler les incompréhensions.

La nuit risque d’être longue.


Sandra Dulier, Plume Funambule