Une fenêtre sur l’horizon claque le sinistre volet d’une ombre lampée de vide. La mer se déchaîne, claque les rochers, embrume la plage d’une île sur roc. Demeure de fin XIXème accrochée en proue, tu soupires un passé inconnu.
Le rêve matérialise une histoire qu’aucun livre n’avait encore narrée. Le sixième sens est une porte qui ouvre les voies de la nuit. L’oreiller tourmenté s’empreinte des mouvements saccadés d’une vision où le feu des bals s’enlise dans la fumée en chandelles.
La rêveuse connaît cet endroit primitif de son âme. Elle ignore le nom, l’adresse, le pays, les paysages. Quoique ! L’image se précise, l’atmosphère, les bruits, les sensations… Tout est étrangement connu. Des voix se perdent, se cherchent, dialoguent, sans visages, mais bien là sur cette île de nulle part.
Quelles difficultés labyrinthiques prend notre esprit lorsqu’il recherche ces instants en vertige d’un vécu que nul à part lui ne peut retrouver ! Faut-il une nuit sans lune, un corps brisé par la fièvre pour se guider à travers ses murs ? Le sommeil semble si long et cyclonique dans ces moments d’errances aux racines d’un temps insoupçonné.
Je rêve, se dit-elle… Je vais me réveiller !
Nulle volonté cependant ne peut briser le sceau d’un pacte avec ce passé. Aïeule, secret de famille, réincarnation, empreinte de vie, fantôme, folie… Pourquoi cette étrange sensation ? Une seule solution : creuser de la plume cette vision pour en désensabler les incompréhensions.
La nuit risque d’être longue.
Sandra Dulier, Plume Funambule